Episode Transcript
[00:00:05] L'Histoire d'un crime, le cas de Jean-Claude Romand.
[00:00:35] Pour la seconde partie de ce podcast, j'ai parlé avec un ami qui a fait des études de psychologie aux Pays-Bas. Je lui ai demandé un peu sur le psychisme de Jean-Claude et sur des phénomènes que je n'ai pas vraiment compris dans ce cas. Ses réponses m'ont enrichi beaucoup et m'ont aidé à mieux comprendre comment une personne comme Jean-Claude pense et d'où vient son comportement. L'interview est en allemand parce que mon ami ne parle pas français, mais j'ai essayé de traduire un peu ses réponses.
[00:01:06] D'accord, la première question c'est, quelle qualité une personne doit-elle posséder pour être capable de tromper tout son environnement personnel d'une manière aussi prolongée sans se faire démasquer ni éprouver de remords ? Peut-on d'ailleurs supposer qu'elle possède une forme de conscience généralement ? Oui, alors je pense qu'il faut une série de caractéristiques pour y parvenir.
[00:01:36] Une grande intelligence semble déjà être importante. Je pense aussi que cela s'est manifesté au cours de la vie de ces personnes. Une faible empathie ou peu de compassion pour les autres est, selon moi, un facteur déterminant.
[00:02:01] De plus, je dirais que montrer la vérité aux autres n'a plus autant de valeur que d'autres choses, comme l'argent par exemple. Cela prend alors des caractéristiques de narcissisme, ce qui ne confirme pas évidemment qu'une personne ait ce diagnostic, mais on peut dire que des symptômes ou un comportement dans ce sens sont déjà des signes.
[00:02:31] Je pense qu'une certaine part génétique est nécessaire, mais cela peut aussi être lié à l'enfance.
[00:02:43] Tu as parlé de narcissisme. Est-ce que tu peux nous expliquer ce qui signifie ce diagnostic ? D'une part, il y a plus d'empathie pour les autres, ou bien on prête peu d'attention à eux.
[00:02:58] Si, par exemple, le narcissist est l'autre personne, elle regarde rarement le visage, parce qu'elle ne peut pas y lire grand chose et ne perçoit pas beaucoup d'informations de cette manière.
[00:03:10] Elle obtient plutôt des informations à travers de la conversation, de ce qu'on dit littéralement et comprend très peu les émotions implicites, car elle ne sait tout simplement pas les lire.
[00:03:26] De ce fait, l'autre personne a naturellement beaucoup moins de valeur, puisque l'on ne voit pas grand chose en elle, tandis que soi-même, on s'estime énormément. On s'accorde une très très grande valeur personnelle, et l'autre est déplacée à l'arrière-plan. Et quoi peut-on comprendre d'un suicide élargi ? Pour quelles raisons une personne pourrait-elle ressentir le besoin d'impliquer son environnement personnel dans un suicide ou, dans ce cas, une tentative de suicide ?
[00:03:57] C'est effectivement une question très intéressante et c'est aussi ce que je me suis demandé au début, car lorsqu'on pense à un narcisse ou à une personne présentant des traits narcissiques, on imagine d'abord qu'il se voit comme la personne la plus importante et que son suicide ne concernait que lui-même. Mais il semble que les personnes de l'environnement personnel soient aussi perçues comme très proches et l'appartenant à son cercle.
[00:04:27] Par exemple, si le fait que sa famille pourrait découvrir la vérité lui paraît une grande souffrance, comme dans ce cas précis, où ses mensonges le démasquent, c'est possible qu'il ne voulu pas faire subir cette souffrance à son entourage et à soi-même. C'est ainsi que je l'expliquerai. Cela pourrait bien sûr être différent, mais ce serait une possibilité.
[00:04:57] Alors, pourrait-on dire qu'il décide un peu au-delà de sa famille, comme s'il ne serait pas capable de décider il-même ? Peut-être dans une manière de le tenir sous la tutelle ? Effectivement, on pourrait s'imaginer qu'il retire le pouvoir de décision un peu.
[00:05:20] Je trouve cela aussi très intéressant. As-tu une explication sur le fait qu'il ait passé du temps avec ses victimes avant de les tuer ? Un moment qu'ils ont probablement trouvé agréable ? Par exemple, il regarde la télévision avec ses enfants et déjeuner avec ses parents, ce qui semble paradoxal quand on sait qu'il les a tués ensuite. As-tu une idée de pourquoi cela a été important pour lui ?
[00:05:48] Exactement, je pense qu'on peut l'expliquer par le fait qu'il voulait encore une fois se confronter à lui-même ou à ses proches, ce qui était encore un peu important pour lui, et passer un dernier moment avec eux. Mais je pense aussi qu'il a fait cela pour se familiariser avec la situation, avec l'idée qu'il allait faire quelque chose de vraiment terrible. Est-ce que tu peux répéter la deuxième question encore une fois ? Oui. As-tu une idée pourquoi c'était important pour lui quand, en fin de compte, il les a tués ?
[00:06:19] Je pense tout simplement qu'il voyait sa famille comme une partie de lui-même, de sa personne, qui était pour lui bien plus importante que tout le reste. Oui, d'une manière rare, cela a du sens.
[00:06:35] Exactement. Cela montre évidemment une relation très perturbée avec beaucoup d'autres aspects et dépasse largement notre compréhension morale. Mais on peut l'imaginer ainsi, même si, bien sûr, on ne peut pas l'affirmer avec certitude parce qu'il est impossible de généraliser. Mais c'est une possibilité.
[00:06:54] D'accord, et une dernière question. Penses-tu que le mensonge peut être expliqué comme une sorte de dépendance, où Jean-Claude a perdu ses scrupules progressivement, ou est-ce qu'on peut parler d'une évolution plutôt due à des prédispositions ou à des facteurs environnementaux ? À l'éducation, aux expériences d'enfance, etc. Crois-tu donc que cela s'est développé avec le temps ? et qu'avec ses premiers mensonges, il avait encore un peu de mauvaise conscience et que le mensonge se sent intensifié lorsqu'il a réalisé qu'il pouvait s'en sortir. Tu as déjà dit qu'une tendance pour mentir pouvait être liée à l'enfance ou à des prédispositions, mais comment penses-tu que cela pourrait s'expliquer le mieux ? Je pense qu'il y a eu de nombreux facteurs qui ont joué un rôle.
[00:07:44] Dans la psychologie, il y a toujours ce débat sur l'influence de la génétique par rapport à l'environnement, et on arrive généralement à la conclusion que c'est normalement un mélange des deux. Par rapport à ce cas, on voit aussi que les parents ont créé un terreau favorable aux mensonges et, disons, le sentiment qu'il ne faille surtout pas mentir, tout en rendant cela très facile d'un autre côté.
[00:08:15] Ensuite, il y a la situation avec sa partenaire et ses études qui l'ont en quelque sorte poussé à mentir.
[00:08:28] Mais le fait de maintenir cette situation sans jamais en parler à personne, sans jamais avoir l'intention de la rectifier, Et avec la fierté et l'honneur qui sont tellement importants pour lui, cela peut effectivement indiquer un aspect génétique qui pourrait même prévaloir. Mais c'est difficile à dire.
[00:08:57] Au final, les parents et l'environnement dans lequel elle a grandi jouent un rôle particulier. Il existe bien sûr de nombreuses raisons pour lesquelles on choisit de mentir, surtout lorsqu'on présente des traits anarchistiques, comme une faible empathie.
[00:09:16] Dans ce cas-là, il peut aussi s'agir d'une volonté de démontrer son pouvoir et d'expérimenter, mais d'un autre côté, cela peut également offrir des avantages personnels et financiers. On peut le voir dans ce cas aussi. Il est probable que cela ait été appris durant l'enfance, car ce qu'on apprend à ce moment-là est déterminant pour toute la vie, en observant comment les parents gèrent les choses, etc.
[00:09:46] Oui, je peux aussi l'imaginer. Penses-tu que cela peut être expliqué comme un comportement addictif ? Est-ce que l'on peut considérer le mensonge de cette manière ? Comment l'évaluerais-tu ? Je ne pense pas. Dans le cas du comportement addictif, on satisfait un besoin, quelque chose dont le cerveau dit qu'il a absolument besoin. Je pense plutôt que dans ce cas, la personne a constamment choisi le moindre mal. Elle a pris une direction une fois, et ensuite, il est devenu de plus en plus difficile d'évoiler le mensonge et de se la mettre. Il est donc toujours plus facile de dire, d'accord, je ne vais pas dire la vérité, mais je vais ajouter un petit mensonge supplémentaire.
[00:10:42] Et un jour, cela devient si grand qu'il faut mentir de plus en plus, et l'autre direction, la sortie, serait encore pire. Et à la fin, on voit bien qu'il a considéré cela comme si extrême que le meurtre et le suicide étaient plus faciles que de dire la vérité. Oui, alors qu'à la fin, il a choisi le chemin du monde normal pour lui, car ainsi, il n'était pas confronté à la possibilité d'être démasqué, simplement en tuant tout le monde. Je pense que comme personne normale, on ne peut probablement pas vraiment comprendre comment il a pensé, mais c'est très intéressant.
[00:11:20] Il a probablement été incroyablement malheureux lui-même lorsque son plan n'a finalement pas fonctionné. Il a investi tant d'efforts pour se tuer et que cela ne marchait pas, cela a dû être vraiment terrible dans sa tête, d'une certaine manière, de survivre comme la seule personne de la famille. Mais il est aussi possible que ce soit une chose positive car il avait peut-être eu une grande peur de la mort.
[00:11:46] Je pense qu'au final, on ne comprendra peut-être jamais vraiment ce qui se passait dans sa tête. Par chance. Merci beaucoup, c'est tout de ma part. J'ai trouvé l'interview très intéressant et je suis heureuse que tu aies enrichi mon podcast. De rien. C'est bien sûr difficile de l'évaluer certainement, mais c'est bien d'avoir un peu d'opinion. Oui, alors pour moi, c'est l'important, je pense.
[00:12:17] Oui, c'est certainement un cas fascinant. Dans ce cas, on pense que si quelqu'un a une prédisposition génétique, tous les facteurs entourants, comme la famille, sa copine et ses études, sont pour lui désagréables et constituent des éléments supplémentaires qui peuvent le pousser dans une certaine direction.
[00:12:46] C'est vraiment intéressant, mais je me dis aussi que c'est vraiment malchanceux. Il a vraiment eu beaucoup de malchance, mais bon, la manière dont il a géré cela n'était pas la bonne. C'était le podcast Histoire d'un crime. Et avec les épisodes, le cas de Jean-Claude Romand. J'espère que les deux épisodes vous ayez donné une meilleure impression d'un cas de crime et du psychisme d'une personne capable d'un tel crime. Si vous voulez en savoir plus, je vous ai noté quelques sources. A la prochaine fois et merci pour votre attention.
[00:14:20] Merci d'avoir regardé cette vidéo !
